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NBA : LOCKOUT , MODE D'EMPLOI

AP99010601950.jpgSi le basketteur NBA a pour habitude de passer ses vacances en alternant plage et gymnase, cette année est assez différente. Cette année, la NBA s’est mise en grève. Si l’impact est faible pour l’instant, cette grève à durée indéterminée ou "lock out" risque de mettre à mal la saison à venir. Analyse de la situation pour essayer d’y voir un peu plus clair, alors que les négociations sont au point mort.

 

LOCK OUT: DÉFINITION ET PRÉCÉDENTS

Les salaires en NBA sont régis par un accord global entre tous les joueurs et les propriétaires pour définir une grille de salaire en accord avec les revenus générés par l’ensemble de la NBA. Suite à l’expiration du précédent accord qui définissait le partage des recettes jusqu’en juillet 2011, les propriétaires ont voté l’arrêt de la NBA et ont décidé de se mettre grève. En effet, contrairement à ce que l’on peut entendre, ce ne sont pas les joueurs qui ont décidés de faire grève pour demander une revalorisation salariale. Ce sont bien les patrons qui ont mis leur "entreprise" à l’arrêt et stoppent le versement des salaires aux joueurs. Plus de salaires, plus de joueurs, plus d’équipes. Tout cela ne reprendra que lorsque un accord sera trouvé entre les deux parties.

Cette situation de lock out n’est pas une première. Elle a déjà eu lieu plusieurs fois dans le sport nord américain, notamment en NBA. Il y eut la version légère en 1995, seulement quelques jours, et la version dure en 1999. Cette année là, le jeu n’allait reprendre qu’en janvier, avec une saison écourtée à 50 matchs (contre 82) et l’annulation du All Star Week End. Les autres sports nord américains ne sont pas en reste, puisque la NFL vient à peine de sortir d’un lock out (houleux, plusieurs procès entre les joueurs et les propriétaires). Quant à la NHL, un lock out en 2004-2005 avait débouché sur l’annulation pure et simple de la saison de hockey.

LA SITUATION ACTUELLE: OU SE SITUE LA VÉRITÉ?

Dans l’accord actuel, ou du moins qui était en vigueur jusqu’au mois de juillet, les joueurs se partagent 57% des bénéfices engendrés par la NBA, principalement billetterie, diffusion de matchs et produits dérivés. C’est cette partie du gâteau qui sert de base pour l’accord salarial et l’élaboration des salaires des joueurs. Chaque franchise doit alors négocier les contrats de ses joueurs en respectant l’accord salarial et ses propres revenus. Bien évidemment, les revenus n’étant pas les mêmes pour tous, on trouve des grandes disparités entre les franchises situées sur des gros marchés (NY, Los Angeles, Chicago) et les petits marchés (Minnesota, New Orleans, Indiana), qui découle invariablement sur une inéquité sportive, mais surtout financières. Pour pouvoir se conformer aux règles de l’accord salarial, beaucoup de franchises perdent de l’argent. Si les deux parties sont d’accord sur le fait que le système est à réformer, elles ont des objectifs opposés et chacune propose sa manière d’agir.

Pour les propriétaires, les joueurs gagnent trop. Cela découle sur un déficit abyssal (370M$) et pas moins de 22 franchises sur 30 seraient, selon les propriétaires, déficitaires. Bien que la plupart d’entre eux soient des riches milliardaires qui considèrent leur franchise comme un gros joujou, un nombre grandissant de propriétaires commencent à se lasser de perdre autant d’argent et on parle tous les jours un peu plus de ventes de franchises (New Orleans, Atlanta, Detroit) ou de délocalisation (Thunder, ex-Supersonics de Seattle ou plus récemment le déménagement avorté des Kings). Par ailleurs, les joueurs sont surprotégés avec des contrats longue durée garantis, qui les assurent même en cas de blessure ou de performance médiocre.

Du côté des joueurs, pas question de laisser filer la poule aux œufs d’or: les chiffres d’audience de la NBA et du merchandising n’ont jamais été aussi élevés. Si la santé économique de la NBA est mauvaise, c’est souvent à cause de mauvais choix de la part des propriétaires. Les gros contrats pointés du doigt lors des négociations (Eddy Curry, Rashard Lewis, Michael Redd,...) n’ont pas été exigés par les joueurs, mais proposés les dirigeants. D’accord pour faire des concessions, mais pas question d’enrichir les propriétaires. Surtout que la richesse de la NBA, ce sont les joueurs qui la créent, il est donc normal qu’ils aient une part prépondérante des revenus. Par ailleurs, le salaire moyen des joueurs de la Ligue a baissé depuis une dizaine d’année.

Malheureusement, personne n’ose avancer des bilans ou des chiffres officiels et chaque camp s’attaque par presse interposée à coup de petites déclarations ou de menace de procès. Les nombreuses réunions de concertation sont de plus en plus houleuses, on assiste à la radicalisation des positions de part et d’autre alors que la date de la reprise approche chaque jour un peu plus.Un bras de fer commence alors entre les deux parties pour savoir qui craquera le premier. Mais ce bras de fer est aussi une course contre la montre, avec la date de la reprise du championnat qui approche à grands pas (fin octobre). Sans avancée significative dans le prochain mois, on va tout droit vers l’annulation du début de la saison, si ce n’est pire.

Pour l’instant, la situation est ubuesque: l’accord salarial ayant expiré au début du mois de juillet, la NBA n’existe plus en tant que telle du fait de la grève des propriétaires. Interdiction donc aux joueurs de rencontrer le staff (même pour des raisons personnelles), de porter les couleurs de la franchise ou d’utiliser les infrastructures de la franchise. De son côté, interdiction pour les propriétaires et la NBA d’évoquer les joueurs, de les contacter, d’utiliser leurs photos, de diffuser des vidéos de matchs (allez faire un tour sur www.nba.com...). Avis aux téméraires, la sanction en cas de violation de ces interdits s’élève à 1M$.

LES IMPACTS DU LOCK OUT

Le premier impact, déjà visible, est l’expatriation des joueurs. Sans contrats et dans l’impossibilité de pratiquer le basket en NBA, plusieurs joueurs se sont décidés à aller monnayer leur talent à l’étranger. Cibles privilégiés: l’Europe et la Chine. Évoquée comme une lubie il y a plusieurs mois par plusieurs joueurs européens, cette hypothèse est devenue très réaliste lors de la signature de Deron Williams au Besiktas. Que des joueurs de complément européens partent signer dans leur pays natal, passe encore. Mais là, on parle d’un multiple All Star, médaille d’Or à Beijing et parmi les meilleurs à son poste actuellement. Nombreux sont ceux qu’on annonce d’ores et déjà sur le départ comme Kobe Bryant, Dwayne Wade, Carmelo Anthony ou Chris Paul en cas d’annulation du début de saison. Avec des propositions de salaires mensuels qui se chiffrent en millions de dollars, les clubs turcs, espagnols ou chinois, souvent soutenus par des investisseurs ou des sponsors locaux (ex: Turkish Airlines pour Kobe), possèdent les atouts financiers nécessaires pour attirer les superstars de la NBA. Quid de l’avenir du joueur si la saison NBA reprend en cours d’année? Des clauses sont déjà toutes prêtes pour libérer les joueurs dès que la saison redémarre. Tout le monde y trouve son compte, les joueurs se remplissent les poches sans perdre la forme et les clubs possèdent en l’espace de quelques mois d’une vitrine inespérée pour leur club et d’une source considérable de revenus. La venue de ses joueurs va évidemment bien au delà de l’aspect sportif...

On peut critiquer l’aspect mercenaire de ces arrangements, l’aubaine de voir un Melo ou un CP3 évoluer dans son club de coeur est unique. Quand on voit l’enthousiasme suscité en Turquie par la signature d’un Allen Iverson plus que déclinant ou en Chine avec Starbury (en mode dark, loin de son meilleur niveau), on ose imaginer l’impact de la venue massive de ces joueurs. En France, nous ne sommes pas en reste puisque Nicolas Batum a signé pour faire un pige à Nancy pendant le lock out. En attendant TP à l’ASVEL ou Diaw à Bordeaux?

Le lock out peut également signifier la fin de carrière pour certains joueurs. Pour l’instant, aucune retraite anticipée n’est à déplorer (le Shaq avait décidé d’arrêter avant la fin de la saison) mais on peut craindre de voir partir des Jason Kidd ou Steve Nash, si jamais la grêve s’éternisait. En 1999, le lock out avait fait une victime notoire: Michael Jordan. Certains pourraient aussi voir leur carrière exploser en vol: lors du précédent lock out en 1999, plusieurs joueurs étaient arrivés hors de forme à la reprise de la saison et n’avaient jamais pu retrouver leur niveau jeu par la suite. En 1999, on se rappelle de Shawn Kemp et Vin Baker, minés par leur addiction respective à la cocaïne et à l’alcool.

Autre impact que l’on peut mentionner, le niveau de la draft. La crainte de passer une saison sans jouer (et sans salaire) a dissuadé de nombreux jeunes crack de s’inscrire, les forçant repousser d’un an leur accession à la NBA. C’est relativement un bon point pour l’évolution de leurs fondamentaux et pour le millésime 2012 qui s’annonce par conséquent extrêmement dense. Mais, revers de la médaille, le niveau de 2011 s’annonce a priori faible. Les seuls joueurs ayant eu un intérêt à se présenter cette année sont les seniors (rarement les meilleurs joueurs) ou ceux ayant réalisé une année d’un niveau inespéré, qui allait bien au delà des attentes, afin de décrocher un spot assez haut. Kyrie Irving (#1, Cleveland) et Derrick Williams (#2, Minnesota) n’auraient jamais du obtenir ces spots là dans une saison normale. Quant à Bismack Biyombo (#7, Charlotte) ou Kemba Walker (#9, Charlotte), ils ont flambé cette année, ce qui leur a permis d’espérer d’être choisis aussi haut.

Au niveau économique, l’impact risque d’être assez violent également. Si les joueurs et les propriétaires ne risquent pas de souffrir de cette coupure prolongée, le monde NBA draine tellement d’emplois autour de lui que cet arrêt, même momentané, risque de faire des dégâts. Plusieurs franchises ont déjà fait des coupes drastiques dans leur personnel extra-sportif, et les prochains à être touchés seront les commerces en rapport avec le basket, particulièrement les commerces aux abords des stades ou les boutiques de maillots. Les médias, touchés très durement lors du lock out de 1999, sont aussi les prochains sur la liste. Difficile de croire que la NCAA ou l’Euroligue permettra de combler le vide laissé par la NBA. Sans parler du désamour que risquent de générer ces négociations vis à vis des fans...

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